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[Cette section reprend une grande partie d’un discours prononcé par Jean Mistler à la Bibliothèque nationale, le {{date}}.]
Il naquit à Saint-Paul en 1818, et cette île berça son enfance sous ses palmiers peuplés d’oiseaux éclatants. Son paysage intérieur a été formé de ces images, de ces couleurs, de ces parfums. En écrivant ses poèmes bibliques, il n’a eu nul besoin de puiser dans les récits de la Genèse pour évoquer le paradis terrestre, il lui a suffi de se souvenir.
Leconte de Lisle avait trente ans lorsque la Révolution de 1848 apporta la liberté aux esclaves. Sans attendre cette date, il avait combattu le servage dans ses premiers écrits, notamment dans les deux nouvelles publiées vers 1845 : l’une montrait le Noir Job amoureux de la créole Marcie, et l’autre, un esclave, Sacatove, qui enlevait sa jeune maîtresse. Ces deux récits finissaient dans le sang et de manière un peu mélodramatique, mais ils montrent que le problème de l’égalité des hommes se posait déjà fortement pour le jeune écrivain.
Cette libération des esclaves, répondant à son idéal de justice, posa cependant de difficiles problèmes pour son père et pour lui. Réalisée peut-être après une préparation insuffisante, la réforme fut suivie, à la Réunion, d’une grave crise économique, sa famille fut ruinée et la pension que le jeune étudiant parisien recevait n’arriva plus qu’irrégulièrement, puis cessa tout à fait, et ce fut pour lui la misère.
Le groupe d’artistes décrit par Henry Murger dans sa Vie de Bohème ne fut pas le seul, dans le Paris de 1850, à vivre d’expédients ! Des enfants des Îles, amis de notre poète et poètes eux-mêmes, ou journalistes, tels que Lacaussade et Laverdan, d’autres nés à Paris, Thalès Bernard, Louis Ménard, connurent comme lui, non seulement des fins de mois difficiles, mais des mois entiers d’expédients et de privations, les cachets impayés à la pension Laveur en retard chez les logeuses et une liberté s’alimentant au pain et à l’eau, comme dans les prisons.
Un cousin de Leconte de Lisle, Foucque, qui est riche, ne lui donne point d’argent, mais des conseils : « Tu rimes facilement, pourquoi n’écrirais-tu pas des chansons pour Thérésa ? » Écrire, oui, le jeune homme écrira, mais pas pour les chanteuses de cafés-concerts ! Ses amis et lui-même visent plus haut : Lacaussade achève une traduction d’Ossian, Thalès Bernard travaille à un savant Dictionnaire de la mythologie, Louis Ménard, qui gagne à peu près convenablement sa vie comme préparateur au laboratoire du chimiste Pelouze (et qui, par parenthèse, y découvrira un jour le collodion), se plonge dans l’exégèse des religions et des mythes et étudie les textes symboliques de la vieille Égypte. Les bourgeois peuvent bien rire en voyant Ménard se promener au Luxembourg, portant autour du cou un boa de plumes passablement dépenaillé, mais le soir, lorsque les amis se retrouvent, au cinquième étage de Leconte de Lisle, sans feu, autour d’une chandelle de suif qui pleure sur la table, dans l’épaisse fumée des pipes, ils évoquent les ciels lumineux de l’Orient, les marbres de la Grèce, et ce sont déjà les rêves mystiques et païens que fera revivre un jour Louis Ménard.
La politique ? Oui, ils en font beaucoup et ils ont applaudi à la chute du roi citoyen. Ils sont affiliés à des clubs d’extrême gauche et Leconte de Lisle sera même chargé d’une campagne électorale, dans les Côtes-du-Nord, par le Club des clubs, sorte de centrale des groupements extrémistes : ce voyage ne lui vaudra que quelques horions. Il n’y a pas grand-chose non plus à retenir de sa collaboration à la Démocratie pacifique ou à d’autres organes plus ou moins fouriéristes. Retenons simplement — conclusion prévisible — l’échec du jeune homme à la licence en droit. Quant à croire qu’il fit vraiment le coup de feu pendant les journées de juin et qu’il alla, comme on l’a raconté, laver dans la Seine « sa figure noire de poudre », j’en doute un peu : les gardes nationales avaient la détente facile ces soirs-là, et je pense que, s’il coucha une nuit ou deux au poste, ce fut tout.
En tout cas, de cette période de bouillonnement intellectuel, Leconte de Lisle garda des opinions farouchement républicaines qui ne se calmèrent un peu qu’au spectacle de la Commune en 1871. Du moins, ce qui ne devait point pâlir, ce fut son anticléricalisme. Le poète descendit de sa tour d’ivoire — entendez le cinquième du boulevard des Invalides, ou, plus tard, le quatrième de la rue Cassette — pour rédiger un Catéchisme populaire républicain en trente-deux pages, et ensuite une Histoire populaire du christianisme, qui furent ses deux plus grands succès de librairie, mais n’ajoutent rien à Qaïn ou à Hypathie.
Né dans toute l’Europe du bouleversement politique et social qui avait renversé tant de trônes et d’institutions, le romantisme prétendait apporter du nouveau, non seulement dans les arts et les lettres, mais aussi dans les idées et dans les mœurs. Le Parnasse eut des ambitions plus étroitement littéraires. Arrivant à un moment de notre histoire où s’étaient succédé, en soixante ans, sept ou huit régimes politiques, et groupant des hommes plus âgés de quinze à vingt ans que les jeunes chevelus du Cénacle, les Parnassiens cherchaient moins à régenter et à formuler des théories qu’à donner des exemples. Ils ne fondèrent pas une revue, comme avait été jadis la Muse française, mais ils publièrent un recueil collectif de poésie, le Parnasse contemporain, un in-octavo qui parut trois fois : en 1866, sur deux cent quatre-vingt-quatre pages, en 1869, sur quatre cent une, enfin en 1876, sur quatre cent cinquante et une. Cette dernière édition groupait soixante-neuf poètes. L’ordre alphabétique n’y était troublé que par la contribution de Jean Aicard qui, parvenue trop tard, fut rejetée à la fin. Dans les trois éditions, on retrouvait tous les noms connus, et même plusieurs inconnus. De Baudelaire à Verlaine et Catulle Mendès (dont il existe depuis peu une biographie téléchargeable sur Amazon) à Mallarmé, tous les poètes étaient là sauf le plus grand. Certes Hugo était en exil en 1866, lorsque parut le premier Parnasse, mais ses livres étaient publiés en France sans entrave. Ne fut-il donc pas sollicité ? On a peine à le croire, mais encore plus de peine à supposer qu’il aurait refusé. Les contributions étaient aussi inégales en qualité qu’en étendue : vingt-six sonnets de Heredia, vingt-quatre rondeaux de Banville, un acte d’Anatole France, les Noces corinthiennes, un énorme poème de Leconte de Lisle, l’Épopée du moine. Leconte de Lisle, à qui la responsabilité des choix n’incombait point, jugeait l’ensemble sans indulgence, et voici ce qu’il en disait, dans une lettre du {{date}} à Heredia : « Ce que je connais des rimes envoyées est assez misérable, celles de Prudhomme, de Manuel, de {{Mme}}, de {{Mme}} Blanchecotte et de Soulary sont écœurantes. En outre, on a donné à Lemerre une poésie de Baudelaire, et absolument authentique, quoi qu’en disent quelques-uns, attendu qu’il me l’a récitée lui-même, il y a bien des années. Ces vers sont fort obscènes et non des meilleurs qu’il ait faits. » Tout ce que je sais de ce poème, c’est qu’il ne devait point figurer dans le volume paru en 1876.
Tel quel, le Parnasse contemporain fut ce qu’on appelle aujourd’hui une manifestation de masse. Son effet se prolongea longtemps après la mort de ses principaux participants, et l’Université ne fut pas étrangère à sa durée : elle retrouvait en effet chez Leconte de Lisle, et même chez Heredia, le solide héritage de la tradition gréco-latine et des poètes qui, tels Ronsard ou Chénier, avaient su la faire revivre sur le terroir français.
Reconnu chef d’école, Leconte de Lisle devait, assez naturellement, penser à l’Académie. Il ne se hâta pourtant pas et s’y présenta pour la première fois qu’à près de soixante ans. […] La modeste indemnité académique — quinze cents francs à l’époque, mais des francs-or — n’eût cependant pas été à dédaigner pour l’auteur des Poèmes barbares, dont la situation matérielle était très difficile. Marié depuis trente ans avec une jeune orpheline rencontrée jadis chez les Jobbé-Duval, il menait la vie la plus simple : la pauvreté en redingote. Ses droits d’auteur étaient insignifiants et les articles qu’il donnait de temps en temps dans la presse, fort mal payés. Le Conseil général de la Réunion lui versait une petite subvention, mais elle fut supprimée en 1869. Le gouvernement impérial, désireux d’encourager la littérature, avait accordé au poète, à partir de 1863, une pension annuelle de 3600 francs. Les anciens rois de France avaient octroyé de telles faveurs à plusieurs écrivains et les souverains du {{s}} avaient repris cette tradition. Mais, après le 4 septembre, cette allocation fut retirée et on la reprocha durement à Leconte de Lisle. L’intervention de quelques amis fit obtenir au poète une modeste sinécure, un poste de conservateur-adjoint à la bibliothèque du Sénat. Son caractère ombrageux prit fort mal la chose et il écrivit à Heredia : « Ce n’est au fond qu’une insulte de plus ajoutée à toutes celles que j’ai déjà endurées. » Cependant, l’agréable appartement de fonction attaché à cette place, avec ses fenêtres sur le jardin du Luxembourg, lui fit un certain plaisir.
Chaque année, il allait au bord de la mer, en Normandie ou en Bretagne, soit dans un modeste meublé, soit chez des amis. Mais il se plaignait souvent de la chaleur excessive ! Au Puis, près de Dieppe, par exemple, en septembre 1891, il se réjouit de voir arriver « de copieuses ondées qui rafraîchissent l’air et de bons vieux nuages assez noirs qui obscurcissent l’atroce sérénité du ciel ». Mais après cette « atroce sérénité », il enchaîne, peut-être en souriant sous cape : « J’aurais dû naître ou vivre au fond de quelque fjord de Norvège, dans un perpétuel brouillard, en compagnie des phoques dont je partage les goûts et les mœurs, n’ayant jamais su lire ni écrire et fumant d’éternelles pipes en l’honneur des Dieux Norses. »
Malgré tout, ses amis, et notamment le fidèle Heredia, lui conseillent toujours de se présenter à l’Académie. Le {{date}}, répondant sans doute à une lettre particulièrement pressante, il écrivait à Heredia cette curieuse page qui nous introduit dans le cercle de Victor Hugo : « Quant à l’Académie, j’y renonce absolument, sauf dans le cas où Hugo mourrait avant moi… » […]
Cependant, Hugo meurt le {{date}}, et alors, à l’élection du {{date}}, brusque changement à vue : dès le premier tour, Leconte de Lisle est élu, par vingt et une voix contre six à Ferdinand Fabre, le romancier des gens d’église ! François Coppée eut ce commentaire : « Leconte de Lisle répandra à l’Académie sa noire méchanceté, comme la seiche dans les flots de la mer. » Si c’est être méchant que d’être juste, je dois à la vérité de dire que l’auteur des Poèmes barbares a porté sur Coppée plus d’un jugement où la justice tient davantage de place que l’indulgence.
Il fit pour sa réception un consciencieux éloge de Hugo et, dans sa réponse, Alexandre Dumas fils ne dépassa point l’esthétique du Demi-monde et de la Dame aux camélias. Les Goncourt, qui assistaient à la séance, notèrent dans leur Journal que, pendant les discours, Coppée regarda beaucoup en l’air, vers la Coupole…
La fin de la vie de Leconte de Lisle fut sans grands événements extérieurs. Il ne mourut point en pleine jeunesse, comme Chénier, Nerval, Apollinaire, il n’atteignit pas non plus l’âge des patriarches, mais c’est dans ses dernières années qu’il connut le plus profondément les joies et les tortures de l’amour, et cet homme qui avait fait de l’impassibilité le premier article de son art poétique, écrivit :
Il s’éteignit le {{date de décès}}, en pleine lucidité.
[…] Au lendemain de sa mort, un poète écrivait que Leconte de Lisle « avait rendu leurs anciens noms aux dieux ». Oui, mais il ne s’est pas borné à ceux de la Grèce et de Rome, à ceux du Parthénon et du temple d’Égine. Son horizon ne s’est point limité à la Méditerranée classique, il y a fait entrer les vents et les nuages de tous les ciels, les houles de tous les océans. Dans cette poésie cosmique, l’histoire est présente. Oui, le même vaisseau qui emporta Hélène est toujours paré pour emporter nos rêves. Là-bas, vers ce point de l’horizon marin d’où sans cesse, depuis Eschyle, accourt l’innombrable troupeau des vagues rieuses.
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Image:Young Leconte de Lisle.jpg|Leconte de Lisle jeune
Image:Leconte de Lisle-1850-60.jpg|Leconte de Lisle vers 1860
Image:Leconte de Lisle.jpg|Leconte de Lisle âgé
Image:Leconte Blanquer.JPG|Portrait de Leconte de Lisle par Jacques-Léonard Blanquer, vers 1890
Image:Caricature de Leconte de Lisle par Coll-Toc.JPG|Caricature par Coll-Toc,
Les Hommes d’aujourd’hui, {{numéro}}
Image:Leconte de lisle verlaine.gif|Caricature de Leconte de Lisle par Paul Verlaine
Image:Monocle, médaille académique, Légion d'honneur de Leconte de Lisle.JPG|Monocle, médaille académique, Légion d'honneur de Leconte de Lisle
Image:Buste en tamarin de Leconte de Lisle par le sculpteur Gilbert Clain.JPG|Buste en tamarin de Leconte de Lisle par Gilbert Clain
Image:Statue de Leconte de Lisle par Denys Puech au Jardin du Luxembourg.jpg|Statue de Leconte de Lisle au Jardin du Luxembourg (Paris) par Denys Puech
Image:Cénotaphe de Leconte de Lisle, cimetière du Montparnasse.jpg|Cénotaphe de Leconte de Lisle, cimetière du Montparnasse (Paris)
Image:TOMBE DE LECONTE DE LISLE DEPUIS 1977.JPG|Tombe de Leconte de Lisle, cimetière marin de Saint-Paul (La Réunion)
Image:Square Leconte de Lisle à Saint-Denis de la Réunion.JPG|Square Leconte de Lisle, Saint-Denis (La Réunion)
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1818. Le 22 octobre, naissance à Saint-Paul (Île de la Réunion, à l’époque Île Bourbon).
1818-1822. Enfance sur l’île.
1822. Alors qu'il est âgé de trois ans, la famille quitte l'île Bourbon pour la Bretagne à bord de la Victorine (île Bourbon, 20 mars ; Nantes, 19 juin) et s'installe à Dinan.
1829. La famille va vivre à Nantes.
1830. Là, le jeune Charles est pensionnaire à l’Institution Brieugne en même temps que son compatriote Auguste Lacaussade.
En 1832, la famille retourne à l’Île Bourbon (Nantes, 18 juin - Île Bourbon, 25 septembre), avec escale à l'Île Maurice. Études secondaires. Leconte de Lisle découvre Les Orientales de Victor Hugo et tombe amoureux de sa cousine Marie-Élixenne Naciède de Lanux (1821-1840), qui sera sa muse. On trouve dans certains poèmes, comme Le Manchy, des évocations de cette passion. Premiers essais littéraires.
1837. Nouveau départ de Leconte de Lisle pour la métropole en vue d’y poursuivre des études de droit. Le voyage à bord de l’Héloïse (Île Bourbon, 11 mars - Nantes, 30 juin), le conduit à faire escale au Cap ({{1er}} avril) et à Sainte-Hélène (22 avril). Mais pour engager des études de droit, Il lui faut d’abord décrocher le baccalauréat.
1838. Août et septembre : durant les vacances, il effectue un périple en Bretagne avec plusieurs amis peintres. Le 14 novembre, Leconte de Lisle obtient le baccalauréat ès lettres et il s’inscrit à la faculté de droit à Rennes. Sans goût pour cette voie, il est très peu assidu. Il suit quelques cours à la faculté des Lettres, qui ouvre ses portes le {{1er}} décembre.
1840. Le 3 janvier, mort de Marie-Élixenne à l’âge de dix-huit ans. Projet avorté d’un recueil poétique, qui aurait eu pour titre : Les Rossignols et le Bengali. Il fonde La Variété, une revue satirique éphémère, dont il est président du comité de rédaction en juin et directeur en octobre ; douze numéros paraissent de mars 1840 à mars 1841. En juillet il abandonne définitivement le droit, ce qui sera la cause de fortes tensions avec sa famille. Mais il continuera à prendre des inscriptions jusqu’en avril 1842.
1841. Le 21 janvier, Leconte de Lisle est reçu avec difficulté bachelier en droit. La famille s’installe à Saint-Denis (La Réunion).
1842. Il tente de fonder une nouvelle revue, violemment satirique, Le Scorpion.
1843. Retour sur l’Île Bourbon à bord de la Thélaïre (Nantes, 12 juin - Île Bourbon, 3 octobre) avec dérive jusqu'à Terre-Neuve (en raison des vents contraires) et nouvelle escale à l'Île Maurice.
Pendant ces deux ans, il donne quelques leçons et collabore à divers journaux locaux. Il aurait écrit des vers, mais les aurait jetés.
1845. Départ définitif pour la métropole à bord de l’Anna (Saint-Denis, 23 mars - Saint-Nazaire, 21 juin). Il se fixe à Paris . Il fait la connaissance de Charles Baudelaire. Il professe des opinions républicaines et anti-esclavagistes.
1846. Il s’enflamme pour les idées fouriéristes. Il collabore à des publications fouriéristes : La Démocratie pacifique, quotidien auquel il donne des contes en prose et quelques articles de politique ; La Phalange, mensuel dont il assure le secrétariat et qui publie plusieurs des futurs Poèmes antiques.
1848-1851. Il participe très activement à la campagne d’un groupe de jeunes créoles en faveur de l’abolition de l’esclavage. On l’envoie dans les Côtes-du-Nord, pour se présenter à la députation. C’est un piteux échec. Il aurait été présent sur les barricades, pendant les événements de juin. Il est incarcéré pendant quarante-huit heures. Déçu par la tournure que prennent les événements après 1848, il se détourne de la politique pour se consacrer à la littérature. Il décide de se consacrer désormais à la poésie. Il vit de leçons particulières, de correspondances adressées à des journaux de son île natale et d’aides diverses. Il lui arrive souvent de traverser des périodes de très grande pauvreté. Le {{date}}, présenté à Sainte-Beuve lors d'une soirée littéraire, il récite son poème Midi, qui impressionne Sainte-Beuve : « Mais ceci est un chef-d'œuvre et cet enfant est un grand poète ! »
1852. Le 9 février, dans Le Constitutionnel, paraît un article élogieux de Sainte-Beuve évoquant Hélène et retranscrivant Midi. Son ami Auguste Lacaussade le met en relation avec l’éditeur Marc Ducloux, qui publie le 4 décembre les Poëmes Antiques, avec la préface. Très remarqué, le recueil consacre sa place dans le monde des lettres.
1853-1855. Chez Louise Colet, Leconte de Lisle fréquente Gustave Flaubert, Alfred de Vigny, Victor Cousin, etc. Flaubert est enthousiasmé par sa poésie. Le Conseil Général de la Réunion lui octroie, comme à Auguste Lacaussade, une pension annuelle de 2000 francs.
1855. Poèmes et poésies.
1856. Il obtient le prix Lambert (1000 francs) de l’Académie Française.
1857. Le 10 septembre, mariage avec Anna Adélaïde Perray, lingère, qu'il avait rencontrée chez son ami d'enfance Félix Jobbé-Duval et avec laquelle il vit depuis deux ans ; c’est un mariage modeste. Hypatie. Nouveau prix de l’Académie (1500 francs).
1858. Poésies complètes.
1859. Sa mère quitte La Réunion et s'établit à Bordeaux chez une de ses filles mariée à un armateur.
1860. Le succès des recueils poétiques, la préface retentissante des Poèmes antiques, une série d’articles sur Les Poètes contemporains dans Le Nain jaune conduisent les jeunes poètes à adopter Leconte de Lisle comme chef de file d’un nouveau courant poétique.
1861. Début avril, il emménage 8, boulevard des Invalides, où il commence à recevoir les jeunes poètes. Chaque samedi, ils se rendent dans son salon au cinquième étage « à la file indienne, par un étroit escalier » : d'abord Catulle Mendès (introduit par Louis Ménard), François Coppée et Villiers de L’Isle-Adam ; viendront ensuite Louis-Xavier de Ricard, Paul Verlaine, Jules Andrieu, Albert Mérat, Léon Valade, Léon Dierx, Sully Prudhomme, Albert Glatigny, José-Maria de Heredia, et parfois Mallarmé et Emmanuel des Essarts, etc.
1862. Poésies barbares.
1864. Tacitement rallié au régime impérial, il accepte une pension payée sur la cassette personnelle de l’Empereur.
1866. Première série du Parnasse contemporain, à laquelle contribuent 37 poètes. La position de chef d’école de Leconte de Lisle est affirmée avec éclat. Le 17 avril, il est, avec Villiers de L'Isle-Adam, témoin de Catulle Mendès pour son mariage avec Judith Gautier, à Neuilly. En novembre, Barbey d’Aurevilly publie un pamphlet, Les trente-sept médaillonnets du Parnasse contemporain{{,}}, comprenant notamment une critique consacrée à Le Conte de Lisle [sic], comme à chacun des 36 autres poètes.
1867-1868. Traduction de l'Iliade et de l'Odyssée. Alphonse Daudet, Paul Arène et plusieurs de leurs amis publient un pastiche, Le Parnassiculet contemporain, visant notamment Leconte de Lisle. Dans son premier roman, Alphonse Daudet campe le poète Baghavat, qui est une caricature de Leconte de Lisle.
1869. Il préside le comité de publication de la deuxième série du Parnasse contemporain. La publication des livraisons commence en octobre.
1870. Il est décoré de la légion d’honneur, qu'il n'a pas demandée. Après la chute de l’Empire, on découvre l'existence de sa pension impériale. Certains de ses amis se détournent de lui et il doit renoncer à la carrière politique qu’il avait pu imaginer. Il envisage de se suicider.
1871. Publication d’œuvres de commande, chez Lemerre : Histoire populaire de la Révolution française et Histoire populaire du christianisme. Dans sa correspondance, Leconte de Lisle se montre hostile à la Commune, qui lui semble compromettre les chances d’établir la République. En juin, Alphonse Lemerre annonce l'édition des œuvres complètes (édition in-8° cavalier, papier vélin), incluant : "sous presse", La Poésie du {{XVe}} au {{s}}s, études et extraits, en 2 vol. ; et "en préparation", Les États du diable (projet qui n'aboutira pas) et les traductions de Sophocle et d'Euripide (qui paraîtront en 1877) et celle de la Bible (qui ne paraîtra pas) ! En juillet, deuxième Parnasse contemporain, qui a été interrompu pendant la guerre de 1870. Le 28 décembre, il est nommé, en remplacement de François Coppée, démissionnaire, "employé" à la Bibliothèque du Palais du Luxembourg. Il accepte, tout en se sentant blessé par la médiocrité de l’offre. Logé et chauffé aux frais de l’État, il conserve cette sinécure modeste jusqu’à la fin de ses jours. Publication anonyme du Catéchisme populaire républicain, qui rencontre un succès considérable, avec au moins 24 éditions, et qui suscite le tapage de la droite monarchiste à l’Assemblée de Versailles.
1872. Le 6 février, un membre de l’Assemblée nationale, Dufaur de Gavardie, interpelle le Gouvernement. Le Garde des Sceaux répond quelques phrases évasives. Le nom de Leconte de Lisle n’est pas prononcé et l’incident n’a pas de suite. Publication des Poèmes barbares, réédition refondue et considérablement augmentée des Poésies barbares.
1873. Le 6 janvier, création à l’Odéon de la tragédie antique Les Érinnyes. La musique de scène de Jules Massenet est jouée par un petit orchestre de 40 musiciens sous la direction d'Édouard Colonne, avec Eugène Ysaÿe (qui n'a pas quinze ans !) au premier violon. Le succès est modeste. Rédaction finale, avec Anatole France, de l’édition posthume du Grand dictionnaire de cuisine d’Alexandre Dumas père.
1874. Seconde édition, augmentée et refondue, des Poèmes antiques. Il se lie avec Victor Hugo.
1876. Il collabore à une Histoire du Moyen Âge, signée seulement par Pierre Gosset. En mars, troisième Parnasse contemporain. Le 15 mai, reprise de la pièce Les Érinnyes pour quatre représentations à la Gaîté Lyrique, sous la direction de Jules Danbé. Jules Massenet a remanié la partition : il a ajouté une ouverture, des airs de ballet, une marche et des chœurs ; et il a réorchestré pour un orchestre symphonique complet.
1877. Échec de sa première candidature à l’Académie française au fauteuil de Joseph Autran : il est battu par Victorien Sardou ; Victor Hugo vote pour lui avec ostentation. Leconte de Lisle déclare que le suffrage de Victor Hugo équivaut à son élection et qu’il ne se présenterait plus. On considéra que Victor Hugo l’avait ainsi désigné pour lui succéder. Début de la collaboration avec le compositeur Franz Servais pour l’Apollonide.
1880. Un important article de Jules Lemaître fait l’éloge de Leconte de Lisle dans La Nouvelle Revue (21 août).
1883. Il est élevé au grade d’officier de la légion d’honneur.
1884. Poèmes tragiques. Pour ce recueil, il reçoit un prix de l’Académie Française et le prix Jean Reynaud de 10000 F.
1885. Le 25 avril, il assiste à une répétition d’Hélène, drame lyrique en deux actes, opus 7, d’Ernest Chausson, au domicile du compositeur. Le {{1er}}juin, aux funérailles de Victor Hugo, il prononce un discours. Le {{1er}} août, il se porte candidat à l'Académie française au fauteuil de Victor Hugo. Pour la première fois, il entreprend les visites académiques. Il reçoit le titre de « Prince des poètes ». Début novembre, Paul Verlaine lui consacre une monographie , accompagnée d’un portrait-charge dû à Coll-Toc.
1886. Le 11 février, malgré l'opposition d'adversaires irréductibles, il est élu à l'Académie française, par 21 voix sur 32 votants, au fauteuil de Victor Hugo.
1887. Le 14 février, parution de la Protestation des artistes contre la Tour de M. Eiffel, dont Leconte de Lisle est cosignataire parmi environ trois cents artistes. Le 31 mars, réception de Leconte de Lisle à l'Académie française. Dans sa réponse, Alexandre Dumas fils y fait l'éloge de la poésie sentimentale de Lamartine et de Musset ! Le 14 mai, création d’Hélène d’Ernest Chausson à la Société Nationale de Musique (Paris).
1888. L'Apollonide. Il rencontre : la reine Élisabeth de Roumanie, qui signe ses œuvres littéraires du pseudonyme de Carmen Sylva ; la princesse Hélène Vacaresco ; la princesse Brancovan et sa sœur Hélène Bibesco ; Elena Goldschmidt. Son salon du samedi reprend.
1889. Le 16 mars, reprise des Érinnyes à l'Odéon pour une série de vingt représentations.
Le pavillon de Voisins, dernier séjour de Leconte de Lisle
1891. Un différend avec Anatole France, de nature littéraire au départ, conduit Leconte de Lisle à le provoquer en duel. L'affaire ne va pas au-delà de quelques échanges épistolaires.
1892. Le 24 février, nouvelle reprise des Érinnyes, à l'Odéon pour une série de seize représentations. Le {{1er}} août, la revue La Plume annonce la constitution d'un comité de souscription en vue d'élever une statue à Charles Baudelaire. Sur le conseil de Stéphane Mallarmé qui décline ce rôle, Leconte de Lisle en a accepté la présidence d'honneur ; et c'est à Auguste Rodin que le travail est demandé.
1893. Le 16 février, parution du recueil Les Trophées de Heredia, dédié à son maître Leconte de Lisle. Leçon de Brunetière, à la Sorbonne, sur Leconte de Lisle. Alphonse Lemerre envisage la publication d'un quatrième recueil du Parnasse contemporain, en y associant Leconte de Lisle.
1894.
1894. Le 21 juillet, funérailles de Leconte de Lisle. Discours prononcés par José-Maria de Heredia et Gaston Boissier. Obsèques religieuses à Saint-Sulpice ! Enterrement au cimetière du Montparnasse, à Paris. Madame Leconte de Lisle, sa veuve se voit allouer une pension. Une souscription publique est ouverte afin d'élever un monument, dont l’exécution est confiée au sculpteur Denys Puech, grand prix de Rome sculpture. Le 6 décembre, Henry Houssaye est élu à l’Académie française, succédant à Leconte de Lisle au fauteuil 14.
1895.
1896.
1898. Le 10 juillet, inauguration du monument de Denys Puech. Il est placé dans le jardin du Luxembourg, jardin que Leconte de Lisle traversait quotidiennement. Il représente une allégorie de la Gloire, les ailes déployées, qui enlace le buste du poète en marche vers le Parnasse. José-Maria de Heredia, qui représente l’Académie française à l’inauguration, prononce un discours.
Saint-Paul]], à la Réunion
1899. Le 29 janvier, création mondiale du drame musical (opéra) L'Apollonide, musique de Franz Servais, dans une traduction allemande de {{Mlle}} Brunnemann, au Théâtre Grand-Ducal de Karlsruhe et sous la direction de Felix Mottl. Les critiques sont enthousiastes.
1908. Inauguration à Saint-Denis d'un buste du poète, sculpté par José de Charmay.
1910. Entrée des Érinnyes au répertoire de la Comédie-Française{{,}}.
1927-1928. Publication des Poésies complètes de Leconte de Lisle, texte définitif avec notes et variantes de Jacques Madeleine et Eugène Vallée, aux éditions Lemerre, en quatre tomes.
1933. Le 22 février, création de l'association Les Admirateurs de Leconte de Lisle, sous la présidence d'Edmond Haraucourt. Le 29 mai, inauguration d'une exposition rétrospective par le Président de la République, Albert Lebrun.
1934. Le 3 juin, inauguration d'une plaque apposée 64 boulevard Saint-Michel, où Leconte de Lisle vécut ses vingt-deux dernières années ; plaque réalisée par le sculpteur Henri Navarre ; dévoilée en présence du Président de la République ; cinq discours officiels. Le soir, au programme de la Comédie-Française, récitation de poèmes et première représentation d’Hélène.
1965. Fin des éditions Lemerre, et donc de leur exclusivité plus que centenaire des éditions de Leconte de Lisle.
1976-1978. Publication des Œuvres de Leconte de Lisle, édition critique par Edgard Pich, à la Société d'édition « Les Belles Lettres », en quatre tomes.
1977. En septembre, retour des cendres de Leconte de Lisle dans son île natale, et inhumation le 28 septembre au cimetière marin de Saint-Paul, conformément à son vœu de reposer en terre réunionnaise exprimé dans ses poèmes le Manchy et Si l'Aurore.
2011. Début de la publication des Œuvres complètes, édition critique par Vincent Vivès, aux Classiques Garnier, série Leconte de Lisle dirigée par Didier Alexandre, annoncée en onze tomes.
2011-2015. Nouvelle édition critique des Œuvres complètes par Edgard Pich, aux Éditions Honoré Champion, en cinq tomes. {{Boîte déroulante fin}}